L’Odyssée permanente

21 avril 2015
Texte :

Image : Amis des Classiques, voyageons !

Pour parfaire leur éducation, les jeunes Anciens étaient envoyés par leurs familles, lorsqu’elles en avaient les moyens, à Rome, à Athènes, à Alexandrie, à Pergame, à Rhodes, ou dans quelques autres lieux de culture (et sans doute de distractions). Sur place, ils découvraient les joies et les tourments de l’indépendance, tout en écoutant les leçons des sophistes locaux et réputés. Comme il n’y a pas d'âge pour apprendre, ces voyages d’étude ne se limitaient pas aux éphèbes débutants. Cicéron par exemple, avait déjà du poil au menton lorsqu'il partit six mois à Athènes puis à Rhodes. Aujourd’hui le voyage d’étude s’appelle voyage scolaire: il fait partie des sirènes destinées à conduire en cours de latin et de grec les élèves. Encore faut-il surmonter les épreuves bureaucrato-herculéennes telles que nous les révèle cette semaine Pauline le Jeune dans sa chronique Mens sana in corpore sano.


S’ils permettent d’apprendre, les voyages permettent aussi d’oublier : en cas de peine d’amour, rien de tel qu’un voyage, comme le rappelle avec humour Ovide :

Surtout, fuyez au loin : quels que soient les liens qui vous retiennent, fuyez ; entreprenez des voyages de longue durée. La seule pensée de quitter votre amie vous fera verser des larmes, et souvent vos pas s’arrêteront au milieu du chemin ; mais plus votre cœur sera rebelle, plus votre volonté doit être ferme, persistez. Si vos jambes refusaient davancer, forcez-les à courir (Remèdes à l'amour, Ovide).


Les voyages lavent le cœur, enrichissent le regard et nourrissent l'esprit, mais comment se déroulaient-ils dans l’Antiquité ? Si les motivations pouvaient être semblables, les conditions ont bien évolué. Sept jours ont suffi aux hypokhâgneux du lycée du Parc pour accomplir une partie de l’Odyssée. S’ils reviennent les yeux chargés d’images et le carnet de voyage bien rempli, enthousiastes à l’idée de fouiller les recoins les plus austères de la grammaire latine, leur périple, d’après l’excellent site Orbis, aurait, à l’époque de Virgile, duré au moins 21 jours et aurait coûté environ 700 denarii, sans compter le fourrage, pour les bêtes. 


Amis des Classiques, si vous êtes rivés au chevalet des lettres, du labeur ou retenus par une Calypso contemporaine, le Confident du réel est là pour rappeler que le premier voyage est intérieur, à la recherche de son humanité et de son identité, et qu’il dure toute la vie.