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Vie d'Abercius Vie de Polycarpe

Texte :

Écrites au IVe siècle pour célébrer la mémoire d’anciens évêques de leur cité, dont l’un n’était connu que par son épitaphe, et l’autre par le récit authentique de son martyre, ces deux biographies les présentent avec des traits hagiographiques, mettant en relief leurs vertus, la qualité et l’orthodoxie de leur enseignement doctrinal, le succès de leur activité d’évangélisation, leurs pouvoirs de thaumaturge, mis au service de leur cité – l’un découvre des sources thermales, obtient de l’impératrice des dons destinés aux pauvres, l’autre guérit des malades, fait cesser par sa prière un grave incendie, une inondation, une sécheresse.

Ces biographies tracent ainsi le portrait idéal de l’évêque du IVe siècle, enseignant et garant de la vraie doctrine contre les déviations hérétiques, protecteur et bienfaiteur de sa cité. Elles témoignent aussi de la manière dont deux communautés chrétiennes asiates du IVe siècle, à une époque où le christianisme était devenu majoritaire, repensent leur passé païen et chrétien (ainsi dans la Vie d’Abercius), ou font remonter au IIe siècle les pratiques et les problèmes de leur époque (dans celle de Polycarpe).

Enjeux, contexte historique, scientifique et bibliographique :

Les deux évêques ont exercé le ministère sous Marc-Aurèle, alors que le christianisme n’était pas une religion reconnue et pouvait faire l’objet de poursuites. Leurs biographies témoignent de cette situation ambiguë, en présentant les évêques comme tantôt poursuivis, tantôt sollicités par le pouvoir. C’est aussi une époque où le christianisme n’est pas unitaire, mais connaît diverses dissidences (marcionisme, montanisme, quartodécimans) combattues par les évêques.

L’épitaphe d’Abercius, redécouverte dans les années 1880, a fait l’objet de très nombreuses études, de même que le récit du martyre de Polycarpe, écrit peu après l’événement. En revanche, les deux biographies, écrites deux siècles après la vie des deux personnages, ont suscité moins d’intérêt du fait de leur caractère hagiographique et de leurs traits légendaires. Elles sont cependant un témoignage valable sur la situation et les problèmes du christianisme en Asie mineure (et jusqu’en Mésopotamie, pour la Vie d’Abercius) au IVe siècle.

 

Pierre Maraval est professeur émérite à l'Université de Paris-Sorbonne. Spécialiste de l'Antiquité tardive, il a publié dans « La roue à livres » l'Histoire secrète de Procope et les Histoires d'Agathias, les Lettres et discours de Constantin, et édité plusieurs textes aux Sources Chrétiennes. Il est également l'auteur de biographies de Constantin, Théodose et de Justinien.

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