Questions naturelles et réponses étonnantes de Plutarque

7 juillet 2020
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Aujourd'hui Amis des Classiques une leçon de choses avec Plutarque pour qui les hommes sont des animaux parmi d'autres

26. Pourquoi les animaux, quand ils souffrent d’une affection, cherchent-ils et obtiennent les remèdes utiles, dont l’usage leur est souvent profitable ?

Les chiennes, par exemple, mangent de l’herbe pour vomir leur bile ; les laies recherchent les écrevisses de rivière, [918c] car, en les mangeant, elles sont guéries du mal de tête ; la tortue, après avoir mangé de la chair de vipère, prend tout de suite de l’origan ; on dit que l’ours, lorsqu’il souffre de nausée, s’en débarrasse en recueillant des fourmis sur sa langue et en les avalant. Et de ces remèdes ces animaux n’ont eu ni l’expérience ni la connaissance fortuite.

Est-ce que donc, tout comme les rayons de miel stimulent et attirent de loin les abeilles par l’odeur, et les 

charognes le vautour, de la même manière aussi les écrevisses attirent les laies, l’origan la tortue, les fourmil- lères l’ours, grâce à des odeurs et des effluves utiles et appropriées, sans que [918d] la sensation les guide par calcul d’intérêt ? Ou bien est-ce que les appétits sont pro- duits chez les êtres vivants par les modifications de leur constitution physique provoquées par les maladies, qui engendrent dans leur corps, par une altération des humeurs, des âcretés ou des douceurs diverses ou d’autres qualités étranges et insolites ?

C’est clairement le cas des femmes quand elles sont enceintes, qui mangent des pierres et de la terre. Aussi les médecins compétents savent-ils prédire en observant leur appétit quels malades sont incurables ou peuvent guérir : le médecin Mnésithée observe que celui qui désire manger des oignons au début d’une pneumonie guérit, tandis que celui qui a envie de figues meurt, parce que les appétits procèdent de la constitution physique, [918e] et celle-ci des maladies. Il est donc vraisemblable que parmi ces êtres vivants ceux qui ne sont pas atteints par des maladies vraiment pernicieuses ou mortelles, maintiennent une disposition et une constitution physique grâce auxquelles chacun d’eux, suivant ses appétits, se dirige et s’oriente vers les aliments salutaires.

Extrait de Plutarque, Questions naturelles, Texte établi et traduit par : Filippomaria Pontani, Introduction et notes de : Michiel Meeusen