Amis des Classiques, parlons d’Amour (et laissons quelques experts nous en parler) !
Parmi les mille et une raisons d’aimer l’Antiquité, il y a la conception que les Grecs et les Romains nous ont transmise de l’amour. Pour les Grecs, l’amour est plus vieux que le monde. Hésiode nous dévoile, au tout début de la Théogonie , qu’« Amour, le plus beau parmi les dieux immortels, celui qui rompt les membres et qui dans la poitrine de tout dieu comme de tout homme dompte le cœur et le sage vouloir » est né bien avant le Jour, la Nuit, le Ciel, les dieux de l’Olympe et naturellement bien avant les hommes. Quelques vers plus loin, Amour se pose sur les gracieuses épaules d’Aphrodite naissant de l’écume pour rejoindre, avec Désir, son cortège. De Platon à Jean-Pierre Vernant, en passant par tous les élèves de Terminale, l'amour est le sujet de prédilection des philosophes qui s’interrogent sur sa nature, Sappho la poétesse le capture dans un seul adjectif « doux-amer » (glukupikron). Les Romains, quant à eux, sont si fascinés par le baiser qu’ils possèdent trois mots pour désigner trois sortes d’embrassements : osculum, le « bisou », basium, le « baiser » et suauium, le « baiser avec la langue ». C’est aussi à Rome que se trouve l’origine de la fête internationale des commerces en tous genres, la saint Valentin.
Au pied du mont Palatin, la grotte du Lupercal, où furent allaités les jumeaux fondateurs de la cité Romulus et Rémus, abritait des cérémonies célébrant l’amour, mais selon des pratiques particulières. Tous les ans au mois de février, avaient lieu des fêtes nommées les Lupercales. Y participaient les Luperques, des prêtres, mais aussi les femmes souhaitant avoir un enfant dans l’année. Après avoir sacrifié un bouc sous le figuier ruminal, les prêtres — car en ce temps-là les prêtres étaient autorisés à être ouvertement lubriques — avaient pour pieux office de courir dénudés dans les rues de Rome afin de fouetter les aspirantes à la maternité. Pour ce faire, ils étaient armés de branchages et de lanières de cuir : autant d’instruments aptes à faire crier plus d’une matrone polissonne. Nul doute que les cérémonies avaient tout pour dégénérer ! Il fallut un pape, Gélase, pour mettre fin aux débordements : pour remplacer ces pratiques licencieuses quoique festives, car il savait bien qu’il serait impossible de priver les hommes de fête, il décida que ce serait l’amour sacré et non plus l’amour profane qui serait célébré à la mi-février. Il trouva pour l’occasion un saint, garant des liens matrimoniaux et célébrant des mariages secrets, enfreignant les ordres de l’empereur qui avait interdit le mariage aux soldats. L’aspirant à la sainteté s’appelait Valentin.
Amis des Classiques, terminons cette trop rapide histoire d’Amour par une pointe de poésie et de sensualité grâce à Virgile, créateur du vers 69, le vers érotique par excellence : Omnia vincit Amor; et nos cedamus Amori. ( « l’Amour triomphe de tout; nous aussi plions devant l’Amour. Bucoliques, X, 69)!
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