Anthologie – À la pêche aux… (Ovide)

15 mars 2022
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Image : Couverture de Ovide, Halieutiques
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Qui dit mois de mars, dit ouverture de la saison de la pêche ! Dans la dernière chronique anachronique au nouveau format, Christelle Laizé et Philippe Guisard nous ont parlé du poisson et de sa symbolique astrale, signe caractéristique du troisième mois de l’année. C’est l’occasion pour nous de vous proposer un morceau de littérature moins connu que les grandes épopées : la poésie didactique, et plus précisément la poésie halieutique (< ἁλιεύω [halieúō], « pêcher »). Si Athénée nous rapporte, dans ses Deipnosophistes, pas moins de huit auteurs d’Halieutiques, seules deux œuvres sont parvenues jusqu’à nous : en grec, un poème en cinq chants d’Oppien de Cilicie ; en latin, un poème fragmentaire d’Ovide. Et c’est ce dernier qui vous décrit aujourd’hui différents modes de pêche…

Noster in arte labor positus, spes omnis in illa.
Nec tamen in medias pelagi te pergere sedes
admoneam uastique maris temptare profundum :
inter utrumque loci melius moderabere funem
<…>
aspera num saxis loca sint – nam talia lentos
deposcunt calamos, at purum retia litus –
num mons horrentes demittat celsior umbras
in mare – nam uarie quidam fugiuntque petuntque –
num uada subnatis imo uiridentur ab herbis,
obiectetque moras et molli seruiat algae.
Discripsit sedes uarie natura profundi
nec cunctos una voluit consistere pisces.

C’est la technique qui règle nos efforts ; c’est en elle que sont tous nos espoirs.
Néanmoins je ne te recommanderais pas d’aller jusqu’en pleine mer ni d’explorer les profondeurs du large : dans un endroit intermédiaire tu seras mieux pour manœuvrer ta ligne. <…>
Observe si le fond est hérissé de rochers : – car il demande alors des roseaux flexibles, tandis qu’une côte dégagée demande des filets –. Observe si une montagne surplombant la mer y projette des ombres redoutables – car certains poissons les fuient, certains les recherchent –. Observe si des herbes poussant au fond des eaux le tapissent de verdure, s’il oppose des obstacles et si l’algue molle y règne. La Nature a varié la disposition des étendues sous-marines, et elle n’a pas voulu confiner tous les poissons au même endroit.

Ovide, Halieutiques, v. 82-93
C.U.F., Les Belles Lettres
ed. et trad. Eugène de Saint-Denis