Voici un extrait du Contre les Gentils d'Arnobe dans la traduction récemment parue aux Belles Lettres :
22. 1. Non contents d’avoir assigné de tels accouplements à la gravité du fils de Saturne, vous professez que le roi du monde lui-même a procréé des enfants d’une manière plus honteuse encore que lui-même n’était né et venu au monde. 2. « C’est d’Hypériona, sa mère, dites-vous, et de Jupiter, lanceur de la foudre, qu’est né le Soleil d’or, brillant de tout son éclat; de Latone et du même père, l’Archer délien et Diane qui poursuit le gibier dans les bois ; de Léda et du même père, ceux qu’on appelle en grec les Dioscures; 3. d’Alcmène et du même père, l’Hercule thébain que protégeaient sa massue et sa peau de bête; de Sémélé et de lui-même, Liber, qu’on appelle Bromius et qui est né une seconde fois de la cuisse de son père ; toujours de lui-même et de Maia, Mercure à la bouche éloquente, porteur d’aimables serpents.» 4. Peut-on infliger insulte plus grave à votre Jupiter? est-il rien qui ruine et détruise mieux l’autorité du souverain des dieux, que de croire, comme vous le faites, qu’il ait jamais succombé à des voluptés coupables et que son cœur enflammé ait brûlé d’ardents désirs pour des femmes? 5. Qu’avait à faire le roi, fils de Saturne, avec les épouses d’autrui ? Junon ne lui suffisait-elle pas et ne pouvait-il apaiser la violence de ses désirs sur la reine des dieux, alors qu’elle se recommandait de sa haute noblesse, de sa beauté, des traits de son visage, de sa dignité et de la blancheur de ses bras de neige et de marbre? 6. Est-ce que par hasard, ne se contentant pas de son unique épouse, il prenait son plaisir avec des concubines, des maîtresses, des petites amies et jetait sa gourme par-ci, par-là, comme le font les jeunes freluquets, ce dieu lubrique, et quand il eut les cheveux blancs, cherchait-il à ranimer l’ardeur de ses plaisirs, que d’innombrables liaisons avaient émoussée? 7. Que répondez-vous, impies? Quelle répugnante idée vous forgez-vous de votre Jupiter? Ainsi, vous ne remarquez pas, vous ne voyez pas quelle flétrissure vous lui infligez? de quel chef d’accusation vous le rendez coupable? quelles honteuses souillures, combien d’infamies vous accumulez sur sa personne?