Un jour, un mythe - Galatée & Pygmalion

Texte :

Chaque jour, un nouveau mythe à dévorer dans votre calendrier de l'avent mythologique ! Par Laure de Chantal

Pygmalion fut témoin de leur [les Propétides] vie de débauche,
Et s’indigna du vice au cœur des femmes mis
Par la nature. Il vivait en célibataire.
Nulle épouse longtemps ne partagea sa couche.
Merveilleux artisan, d’un ivoire de neige
Il sculpte un corps si beau qu’oncques femme en naissant
N’en reçut de pareil, puis en tombe amoureux.
Vraie figure de vierge, elle semblait vivante
Et prête à se mouvoir, n’eût été sa réserve,
Tant l’art se cache à force d’art. Émerveillé,
Il s’enflamme le cœur pour ce semblant de corps,
Souvent s’approche, y met la main pour s’assurer
S’il est ivoire ou chair, ne veut le croire ivoire,
Donne et croit recevoir des baisers, parle, étreint,
Croit que cède la chair au contact de ses doigts,
Craint d’imprimer des bleus sur les membres qu’il serre
Caresse son aimée, lui offre des cadeaux

Chers aux filles, galets, oisillons, coquillages,
Fleurs de mille couleurs, lys blanc ou balles peintes,
Et les larmes tombées de l’arbre des Héliades,
La pare aussi de vêtements, orne ses doigts
De diamants, et lui passe au cou de longs colliers,
Des chaînes sur le sein, aux oreilles des perles,
Tout lui sied, quoique, nue, elle n’est pas moins belle,
Couchée sur un tapis de pourpre de Sidon,
Il l’appelle sa femme, et dépose sa nuque
Sur un mol oreiller, comme une chair sensible.
Tout Chypre célébrait la fête de Vénus,
Des génisses au cou de neige, aux courbes cornes
Revêtues d’or, étaient tombées sous le couteau,
L’encens fumait. Portant à l’autel ses offrandes,
Timide, il dit : Si vous pouvez, dieux, tout donner,
Mariez-moi à une vierge, et n’osant dire :
D’ivoire, dit : pareille à ma vierge d’ivoire.
Vénus était là, parée d’or. Elle comprit
Ce qu’il voulait. Trois fois, présage favorable,
Sa flamme ravivée dressa sa pointe en l’air.
Rentré chez lui, il va vers sa statue chérie,
Couché, lui donne des baisers, et la sent tiède,
En rapproche sa bouche et tâte sa poitrine.
L’ivoire s’amollit, perd sa rigidité,
Docile aux doigts, comme la cire de l’Hymette
Ramollie au soleil, qui, prenant mille formes
Sous le pouce, à l’usage en acquiert de nouveaux.
N’osant croire à sa joie, redoutant quelque erreur,
Surpris, il palpe et palpe encor l’objet aimé.
Il vit. Il sent la veine, elle bat sous son pouce.
Le héros de Paphos par d’abondants discours
En remercie Vénus. Sa bouche embrasse enfin
Une vraie bouche. Ayant rougi sous ses baisers,
Levant vers la lumière un timide regard,
La vierge ensemble voit le ciel et son amant.
La déesse est présente au mariage, son œuvre.

Les cornes de la lune ayant fait neuf pleins cercles,
Une enfant naît, Paphos. L’île en garde le nom.
Ovide, Métamorphoses, X

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