Etre un scientifique, c’est être habité par des énigmes à chaque instant. C’est alors qu’il prenait un bain en s’interrogeant sur une enquête scientifique digne des plus grands romans policiers qu’Archimède trouva la solution de son problème et par là même la loi qui restera dans l’histoire sous le nom de « principe d’Archimède ». Pour préciser cette histoire abordée dans l’épisode n°17 d’Arithm’Antique, voici le récit qu’en fait Vitruve :
9. Quant à Archimède, il a certes fait bien d'admirables découvertes dans maints domaines, mais c'est encore celle que je vais exposer qui, parmi toutes les autres, témoigne, semble-t-il, d'une ingéniosité extrême. Hiéron de Syracuse, parvenu au pouvoir royal, avait décidé de placer dans un temple, en raison de ses succès, une couronne d'or promise par un vœu aux dieux immortels : il mit le prix de l'exécution en adjudication et il pesa à l'adjudicataire, au peson, l'or nécessaire. Celui-ci soumit en temps voulu son travail, exécuté à la main avec finesse, à l'approbation du roi et, à l'aide du peson, il fit la preuve, sembla-t-il, du poids de la couronne. 10. Quand Hiéron apprit par dénonciation qu'une certaine quantité d'or avait été ôtée et remplacée par l'équivalent en argent, incorporé à l'objet, votif, furieux d'avoir été berné, mais ne trouvant aucun moyen de mettre la fraude en évidence, il pria Archimède d'y consacrer pour lui ses réflexions. Et le hasard fit que, avec ce souci en tête, celui-ci alla au bain, et là, descendant dans la baignoire, il remarqua qu'il s'en écoulait une quantité d'eau égale au volume de son corps, quand il s'y installait. Cela lui révéla le moyen de résoudre son problème : sans tarder, il bondit plein de joie hors de la baignoire et, prenant tout nu le chemin de sa maison, il manifestait à voix haute, à tout venant, qu'il avait trouvé ce qu'il cherchait. Car dans sa course il ne cessait de crier, en grec : « J'ai trouvé, j'ai trouvé ! »[1]. 11. Alors, mis ainsi sur le chemin de sa découverte, il fabriqua, dit-on, deux lingots de poids égal – qui était aussi celui de la couronne – l'un d'or, l'autre d'argent. Cela fait, il remplit d'eau jusqu'au bord un grand vase, dans lequel il plongea le lingot d'argent. Il s'écoula une quantité d'eau égale au volume immergé dans le vase. Ainsi, une fois le lingot retiré, il y versa à nouveau la quantité d'eau manquante, en mesurant avec un setier, de manière que, comme tout à l'heure, le niveau affleurât le bord. Il trouva ainsi le poids d'argent déterminé correspondant à une quantité d'eau déterminée. 12. Cette expérience faite, il plongea alors de la même manière le lingot d'or dans le vase plein, et, après l'avoir retiré, il fit alors sa mesure suivant une méthode semblable : parlant de la quantité d'eau nécessaire, non pas égale mais plus faible, il trouva dans quelle proportion, à poids égal, le lingot d'or était moins volumineux que celui d'argent. Or ensuite, après avoir rempli le vase et plongé cette fois la couronne dans la même eau, il trouva qu'il s'était écoulé plus d'eau pour la couronne que pour le lingot d'or de poids égal, et ainsi, partant du fait qu'il manquait plus d'eau dans le cas de la couronne que dans celui du lingot, il mit en évidence par son raisonnement l'alliage d'argent dans l'or et la fraude patente de l'adjudicataire.
De l’architecture, IX, Praef., 9-12 (édition C.U.F.)
[1] εὕρηκα, εὕρηκα, en grec dans le texte latin de Vitruve.