Chaque semaine, un hypokhâgneux, du groupe de grec confirmé (ils se font rares…), vous livre ses impressions, et rien que ses impressions, sur les déclinaisons, les conjugaisons, le vocabulaire et la syntaxe… en toute décontraction !
Σα ne va plus du tout
Nous poursuivons l’étude du grec avec vigueur et ardeur, surtout face à l’aoriste. La connaissance du radical présent n’est plus suffisante : l’aoriste a plus d’un tour dans son sac. Ce temps verbal correspond en français au passé simple. L’aoriste grec est un temps secondaire, c’est-à-dire du passé. Tout comme l’imparfait, il porte un augment au début du verbe - une spécificité du grec ancien - et possède les désinences secondaires. Cependant, à la différence de l’imparfait, il existe à tous les modes, ce qui demande plus d'efforts dans la mémorisation et la familiarisation de ce temps. Tout comme le passé simple en français, ce temps riche en formes exprime généralement l’action, mais aussi l'irréel du passé, le potentiel du passé, le regret dans le passé, mais aussi l’idée pure, de quoi plaire à ce cher Platon féru des idées immuables et éternelles.
L’aoriste se décline en deux grandes catégories : les aoristes thématiques et les athématiques. Ces derniers regroupent eux-mêmes plusieurs types d’aoristes différents tels que les sigmatiques, les passifs (car la forme du passif est différente de celle du moyen maintenant paraît-il) et les radicaux à voyelle longue. Nous devions apprendre tout d’abord les athématiques sigmatiques, des aoristes qui ont entre le thème et la désinence secondaire le suffixe “σ” qui se transformera en “σα”. Pour retenir “ça”, nous avons trouvé un calembour très raffiné : “Quand ça y est, ça y reste.”. Ce n’est pas tout : avec cela, les verbes contractes n’ont plus de contraction mais voient leur voyelle contracte s’allonger (“τιμάω” devient “ετιμησα”). Mais encore, tout comme la troisième déclinaison, quand le radical se termine par une consonne occlusive, le suffixe “σα” change et devient “ψα” avec les consonnes labiales, “ξα” pour les palatales, “σα” pour les dentales.
Néanmoins il faut bien qu’à un moment que “σα” s’en va ! Quand le radical se finit par les consonnes λ,μ,ν,ρ le σ disparaît en effet et laisse place à un allongement compensatoire de la voyelle précédente si elle est brève : ainsi “εστειλα” est-il l’aoriste de “στέλλω ”. De même pour les aoristes à voyelle longue qui sont moins nombreux que les sigmatiques, mais il faut prendre garde à eux : par exemple l’aoriste de “γιγνώσκω ” est “εγνων”, il n’y a pas de“σα”.
Enfin, nous avons eu un bref aperçu des aoristes thématiques dont les radicaux changent complètement parce que sinon ce ne serait pas drôle. L'aoriste de “λέγω” est par exemple “ειπον”, une forme à retenir ! En conséquence, pour les reconnaître - sachant que l'aoriste est très fréquent -, il faudra les apprendre par cœur, vive le grec !
En résumé, l’apprentissage de l’aoriste est comparable à la mort de Gilliatt dans les Travailleurs de la mer de Victor Hugo, on se laisse engloutir par l’eau et les regrets pour avoir voulu continuer le grec. Mais on est fier de maîtriser un temps si complexe dans toutes ses formes, multiples et variées !
Édouard H812
Nous vous disons « pschitt » et à bientôt !