Cette chronique raconte la vie des Classiques à la Renaissance. Des contemporains de l’humaniste Guillaume Budé (1467-1540) permettent de voir comment l’Antiquité alimente la culture, la pensée et la langue de l’époque.
Dante et Virgile, dont nous avions parlé dans la dernière chronique, ont inspiré les artistes. La Barque de Dante ou Dante et Virgile aux enfers (1822) par Eugène Delacroix a servi d’illustration à cette chronique, mais nous ne l’avions pas commenté.
La Barque de Dante ou Dante et Virgile aux enfers par Eugène Delacroix, 1822 (source : Wikimedia).
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Présenté au Salon de 1822, ce tableau s’inspire des chants VII et VIII de l’Enfer. Virgile se reconnaît à ses lauriers. Il est vêtu de pourpre. Les deux poètes sont en train de franchir le cercle des Coléreux (le cinquième cercle). Ceux-ci sont immergés dans les eaux noires du Styx et pour passer, Dante et son « bon maître » (chant VII, vers 115) doivent prendre une barque. « Symbole de la colère » et « gardien du cinquième cercle », Phlégyas, représenté de dos, va être leur nocher. « Irrité contre Apollon, qui avait séduit sa fille, il mit le feu au temple de Delphes, et fut envoyé en Enfer par le dieu. » (note de Jacqueline Risset dans son édition de l’Enfer, p. 323) Parmi les âmes qui agrippent la barque, Dante voit Filippo Argenti, un « riche Florentin du clan des Noirs » et « ennemi particulier de Dante » (Ibid.). La posture du poète marque son effroi : il lève le bras comme pour se protéger (de son vivant, Filippo Argenti l’aurait souffleté !) et bascule en arrière. Protecteur, Virgile garde son calme et soutient Dante dont il tient la main.
Dans les différents tableaux, Virgile apparaît non seulement comme le guide de Dante à travers les enfers, mais aussi comme son protecteur. Ainsi, quand William Bouguereau représente un épisode violent du chant XXX, Dante semble se blottir derrière Virgile.
Dante et Virgile par William Bouguereau, 1850 (source : Wikimedia).
Dans le huitième cercle, qui accueille les faussaires, Gianni Schicchi mord Capocchio. Le premier avait établi un faux testament pour hériter et le second était « faussaire en métaux, et fut brûlé vif à Sienne en 1293 » (Ibid., p. 343).
On retrouve la même attitude effrayée de Dante dans le tableau de Gustave Doré représentant les deux poètes dans le neuvième cercle de l’enfer, celui dans lequel sont les traîtres.
Dante et Virgile dans le neuvième cercle de l'Enfer par Gustave Doré, 1861 (source : Wikimedia).
Les glaçons indiquent que les âmes damnées subissent le supplice du froid éternel. Le surnaturel est symbolisé par les jeux de lumières et la couleur bleu-vert. Gustave Doré n’hésite pas à peindre des détails aussi sordides que réalistes pour augmenter l’effet d’horreur devant les damnés. Le spectateur partage alors l’effroi de Dante.
« Onorate l’altissimo poeta ; / l’ombra sua torna, ch’era dipartita. »
« Honorez le très grand poète ; / son ombre revient, qui était partie. »
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