Les classiques sont bien vivants entre les murs de la vieille Sorbonne, où latinistes et hellénistes continuent d’inscrire les temps anciens au sein du monde moderne !
Je lisais récemment qu’il devenait urgent d’introduire dans les programmes scolaires un enseignement spécifique aux images et à internet pour développer l’esprit critique des élèves, afin de les armer contre ce que l’on appelle des « fake news » – « informations mensongères » n’a pas l’air de convenir pour désigner des informations fausses mises en circulation. Je me demande si Eschine et Démosthène ne suffiraient pas. Traduire en parallèle les discours de ces deux adversaires politiques au IVe siècle avant J.–C. amène automatiquement un élève à formuler une maxime simple : il ne faut pas croire tout ce que l’on nous dit, même si ça a l’air vrai. Si je dis « traduire » et non pas « lire » – ce qui n’est d’ailleurs pas si mal – c’est que traduire est en soi un acte critique, raison pour laquelle les mêmes textes anciens sont régulièrement retraduits. Nos langues anciennes malmenées seraient-elles le remède aux « fake news » ? je n’oserais l’affirmer, mais l’apprentissage du latin et du grec permet d’acquérir des compétences critiques, dont il est peut-être vain de priver les élèves au profit d’une éducation à internet.
M.-A. S.