Les classiques sont bien vivants entre les murs de la vieille Sorbonne, où latinistes et hellénistes continuent d’inscrire les temps anciens au sein du monde moderne !
L’Athènes démocratique, contrairement à Rome, était avare de son droit de cité. Si les réformes de Clisthène se sont accompagnées d’un élargissement du dèmos, la cité s’est, par la suite, montrée soucieuse de ne pas augmenter le nombre de politai. On naît citoyen athénien, on le devient rarement – les Athéniens ne se prétendent-ils pas autochtones, nés de la terre ? Quelques metoikoi ont accédé à la citoyenneté, en remerciement de services rendus à l’État ; le droit de cité fut octroyé collectivement aux survivants de Platées, rasée par les Thébains en 427. Le fait reste exceptionnel. Il est plus facile d’être exclu du dèmos : la perte des droits civiques, atimia, totale ou partielle, punit le politès qui a mis le corps des citoyens et la démocratie en péril, en fuyant au combat, en ne réglant pas ses dettes à l’État, en maltraitant ses parents, en se prostituant, en conspirant contre le régime. Seuls ceux dont la personnalité et le prestige faisaient craindre qu’ils ne voulussent restaurer la tyrannie sont frappés, atimia assortie d’un bannissement de dix ans – sans perdre leur qualité de citoyen. Ainsi la démocratie entendait-elle se préserver. Plusieurs siècles après l’apogée d’Athènes, la Grèce devint province romaine, et à ce moment-là la démocratie directe n’était plus qu’un souvenir.
M-A. S.