Rue de la Sorbonne - Petite chronique des élections

Texte :

Les classiques sont bien vivants entre les murs de la vieille Sorbonne, où latinistes et hellénistes continuent d’inscrire les temps anciens au sein du monde moderne !

Le mardi 14 novembre, tous les personnels de Sorbonne Université, fusion de la Sorbonne traditionnelle et de Pierre et Marie Curie (sciences-médecine), seront invités à exprimer leur choix pour désigner leurs représentants dans les conseils centraux qui éliront pour les uns le Président de la nouvelle Université, pour les autres, le doyen de la faculté des Lettres au sens large. Les campagnes électorales font souvent l’effet de révélateurs : elles peuvent révéler l’émergence d’idées nouvelles ou des réflexes de repli sur soi accompagnés de comportements infantiles. En ce qui concerne les langues anciennes, elles sont dans une situation de survie parfois artificielle si bien que selon moi, la fermeture à de nouveaux horizons les achèverait pour de bon. Or, la fusion des deux universités nous donne une occasion, la dernière sans doute, de les associer à d’autres disciplines, dans des parcours pluridisciplinaires ambitieux et bien conçus, donnant accès à la langue par la culture et la littérature, tout en offrant la possibilité d’expliquer enfin les enjeux de la connaissance des civilisations antiques pour notre monde contemporain. Plus aucun helléniste, plus aucun latiniste ne peut faire comme s’il ignorait que prendre un texte et le traduire sans le mettre en perspective du point de vue de l’esthétique et de l’histoire des idées est le moyen le plus sûr de signer notre arrêt de mort collectif. Nous devons inventer, ouvrir les portes et les fenêtres, sans rien céder de notre exigence de rigueur, sans simplifier, mais cela supposerait que l’on cesse d’agiter comme un épouvantail la perte de ce que personne ne nous demande de sacrifier : nos postes, rares si rares ; nos crédits si dérisoires ; notre autonomie si illusoire, et que nous ayons collectivement une force créatrice et une capacité de renouvellement que la répétition à l’infini de slogans éculés ne garantit certainement pas.

Dans la même chronique