Saisir à chaque fois en quelques lignes une des innombrables contradictions du temps présent, aller en elle la faire parler de nous, s’y aidant par contraste d’une possible… « survie des classiques » ! — et le tout, banalement, dans le double respect des Lumières (la raison seule permettant de croire sans violence) et de la poésie (seule capable, au fond, de débusquer — quand il faut — la violence de la raison même).
Mon voisin Hervé semble parfois moins dégoûté des dealers que de leurs clients.
« Parmi les addictifs de France, n’oublions certes pas » me dit-il, « les 1% qui atténuent au cannabis d’irréductibles douleurs ; ni l’autre pour cent, soyons large, qui en enrobent et emmaillottent une invivable créativité ; trois derniers pour cent incluent les enfances si brusquées, les sorts si malchanceux, les conditions si misérables que ce serait crime d’aller désherber leur oasis à mirages. Bien.
Cela laisse encore 95% d’usagers complaisants, veules et irresponsables, qui font le lit de quelques milliers de cossards salauds, de richards guignols, trop malins pour se joindre à leurs clients, trop nonchalants pour s’entretuer davantage ».
« Il y a plus grave » lui dis-je.
« Non ; le passeur crapuleux, lui, exploite une misère du monde qui vient du monde, que nul embarqué n’a choisi de s’offrir ; mais ce sont au contraire les bourrés du pif, les poudrés du flair eux-mêmes qui causent le divertissement que tarifent ses parasites ».
« Vous les traînez au bûcher pour leur tendance même à mourir à petit feu !... » lui dis-je.
Hervé me regarde. « Où se plaindre » soupirait Hilarion Lefuneste « d’avoir un nain du bulbe pour voisin ? »
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